5.12.2011
Takaka, Golden Bay
Je roulais sous un ciel bleu parsemé d’agneaux blancs, laissant dans le rétroviseur le bas tapis gris qui recouvrait les collines de Nelson. J’étais en route pour Golden Bay, tout au Nord Ouest de l’île du Sud, fenêtre baissée, radio en sourdine, lunettes noires sur le nez et les lèvres en arc-en-ciel retourné. Les noms sur les pancartes avaient maintenant tous des sonorités polynésiennes maories : Motueka, Riwaka, Kaiteriteriri, Marahau, et Takaka, là où je me dirigeais. Une amie italienne m’a beaucoup parlé de ce town et de ses environs, pour y avoir passé quelques semaines l’année passée, il y a un an exactement.
Ce matin à l’agence de location de voitures, quand j’ai dit que je mettais le cap vers Golden Bay, la nana a échangé la voiture qui m’était destinée contre une plus récente :
Ah… Mon amie italienne m’avait effectivement parlé de l’arrivée spectaculaire sur la vallée de Takaka, “en descendant la montagne”, je ne pensais cependant pas que ça nécessitait une voiture avec de bons freins. Je précise que je suis passée par une agence qui loue des voitures anciennes, moins chères et pratique commune en Nouvelle-Zélande (pratique que je trouve brillante !). Après échange, j’ai donc une Mazda blanche, automatique, essence, et qui affiche 240 000 km au compteur !
Alors sous le soleil, les lèvres affichant toujours le contentement, j’entamais la quinzaine de kilomètres en lacets ascendants, en direction du sommet de Takaka Hill, les vergers et pâtures sur ma gauche, bientôt dans le vide sous mes roues, ou sur les versants d’en face. Une belle route, rien à voir avec ce que je connais des serpentins irlandais, qui eux nécessitent une réelle attention (surtout pour éviter les nids de poules parfois de la taille d’un canyon). Une route lisse et large toute en tête d’épingle, de ces routes qui raviraient le moindre pilote du Dimanche. La boîte automatique me facilitait d’autant plus la chose et me laissait tout le loisir d’apprécier le paysage en contrebas.
Une goutte d’eau sur le pare-brise… Bah merde, alors ! Voici que soudainement, je me trouve à battre les essuie-glaces et à remplacer mes lunettes de soleil par mes lunettes de pluie ! Tour d’œil autour de moi, et je m’aperçois que la vue s’est bouchée aussi vite qu’une huître mal lunée ! Brume nuageuse dense, j’approche du sommet sans nul doute, et je reste positive me disant que je retomberai les lunettes noires dès que j’entamerai la descente sur l’autre vallée.
Je suis sortie des nuages quelques kilomètres plus loin effectivement, une fois passé le sommet, sauf que je n’ai jamais retrouvé le soleil, une muraille de grisaille laissant simplement passer sa lumière éblouissante qui nécessitait tout de même… mes lunettes noires ! Le tableau qui s’offrait face à moi n’en était pour le moins ravissant : une vallée verdoyante de pâtures et d’arbres de toutes sortes s’en allait saluer l’horizon tandis que de part et d’autres de cet étroit couloir d’émeraude, de moyennes montagnes se répondait en miroir. La vallée de Takaka était là en contrebas, et la descente toute en virages serrés ne méritait certainement pas les précautions prises plus d’une heure auparavant à l’agence de Nelson. La fille m’ayant avoué qu’elle n’était jamais allée à Takaka, je ne m’étonnais finalement pas de cette information exagérée. La chaîne de montagnes d’Abel Tasman sur ma droite, des jolis monts sur ma gauche, je traversais la vallée abondante, le sourire revenu sur le visage, en ne cessant d’envier ces vaches de part et d’autres de la route, broutant l’herbe tendre des pâturages qui abritaient aussi de nombreux agneaux nés quelques semaines plus tôt. Quelques maisons parsemaient ici et là le territoire, et boy ! Que la vie doit être bonne par ici ! J’ai grandi en ayant des hectares de campagne comme terrain de jeu, et je sais qu’il n’y a pas d’enfance plus heureuse d’insouciance que celle passée à explorer la nature et ses trésors, ignorant les dangers de la civilisation urbaine.
(...)
Lilie