Le Village du Peuple Etrange Voyageur

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    Pays Dogon et fleuve Niger : quinze jours au Mali

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    Pays Dogon et fleuve Niger : quinze jours au Mali  - Page 3 Empty Re: Pays Dogon et fleuve Niger : quinze jours au Mali

    Message par Wapiti Mer 19 Aoû - 17:49

    Oups ! On s'était arrêté là, sur les rives du Niger, depuis si longtemps ?!
    On repart ?
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    Pays Dogon et fleuve Niger : quinze jours au Mali  - Page 3 Empty Re: Pays Dogon et fleuve Niger : quinze jours au Mali

    Message par Wapiti Mer 19 Aoû - 17:51

    Après cette dernière escapade côtière, les dernières heures de lenteur sur le fleuve. Nous savons que notre voyage touche bientôt à sa fin et une certaine nostalgie s’installe déjà, même s’il nous reste encore deux étapes majeures au programme, Djenné et Mopti.

    A Kona, nous abandonnons Alex et Ibrahim, pinassiers équilibristes, fans de reggae.

    Après un court transfert en minibus, nous nous arrêtons au QG de l’agence, à Sévaré, pour déposer le matériel et Tigué, notre chef qui mériterait son étoile au guide Michelin tant il a su régaler nos papilles de ses fabuleux couscous, ragoûts, poulets bicyclette à la sauce tomate-oignon et plats de pâtes. J’en salive encore ! Et ses plats étaient toujours servis en quantités astronomiques. De quoi largement nous rassasier, nourrir toute l’équipe et même quelques familles pauvres aux alentours avec les restes… Geste admirable que nous avons fortement apprécié.
    Nous abandonnons aussi à regret Kalane, notre « guide du fleuve », que nous recroiserons avec surprise et plaisir le lendemain. Merci à toi, ami d’un jour, ami de toujours ; que Dieu te garde, Inch’Allah.

    Pour nous, la route continue, à nouveau à travers la plaine sahélienne roussie par la saison sèche et parsemée de bourgades de pisé. Direction sud-ouest, soleil aveuglant, les joues rougies des heures passées sur le Niger, les yeux toujours grands ouverts sur ce paysage qui défile et sur tous ces souvenirs déjà emmagasinés.
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    Pays Dogon et fleuve Niger : quinze jours au Mali  - Page 3 Empty Re: Pays Dogon et fleuve Niger : quinze jours au Mali

    Message par Wapiti Mer 19 Aoû - 22:47

    C’est peu avant le coucher du soleil que nous arrivons sur Djenné, cité sainte… et ceinte. Djenné, classée au patrimoine mondial de l’Unesco, forteresse de banco sise au milieu des eaux. Pour l’atteindre, il nous faut prendre un bac pour traverser le résidu d’un des bras du Bani, affluent du Niger. Dans quelques semaines, la traversée pourra probablement se faire à gué tant les eaux sont basses.
    Ici, aux portes de la ville, dans un univers de berges de terre ocre, les enfants sont les commerçants, vendeurs-harceleurs de babioles, bijoux, tissus, statuettes, ou objets réalisés en recyclage de fameuses canettes rouges ou autres fils de fer. Une image de l’Afrique que nous n’avions pas encore rencontrée.

    Cette cité, nous la traversons rapidement en 4x4 ce premier soir pour rejoindre notre auberge, face à la grande mosquée. Nous la visiterons plus longuement le lendemain matin avec un guide. Une soirée tiède, avec une petite promenade dans les ruelles et boutiques du quartier, une « vraie » douche, un repas de restaurant un peu pâle (nous regrettons Tigué notre cuistot)…

    Couchés sur une terrasse face à la mosquée, nous contemplons un temps cette lune presque pleine mais en partie cachée par ce que nous prenons pour un voile de brume, un léger nuage (ceci dit, c’est bizarre quand même…), avant de tenter de trouver le sommeil. Mais une rumeur enfle dans la ville et le tintamarre se rapproche jusqu’à nous casser les oreilles dans la rue au pied de l’auberge. Troupe d’enfants, ados et jeunes adultes qui chantent, crient et tambourinent sur des djembés, casseroles et autres ustensiles transformés en percussions. Nous ne comprenons rien, sommes quelque peu désespérés de voir notre sommeil perturbé par ces mœurs barbares… Nous n’apprendrons que le lendemain, au réveil, avec une pointe de surprise et de honte ce qui se passait la veille au soir : une éclipse de lune, et des enfants qui, selon la tradition, faisaient du bruit pour que le chat rende la lune ! Ce n’était donc pas un nuage…    
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    Message par Skyrgamur Mer 19 Aoû - 22:59

    Pas mal le coup de l'éclipse !!!


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    Message par Wapiti Jeu 20 Aoû - 20:54

    Djenné, des trois villes maliennes visitées, est celle qui m’a le plus plu. De par sa qualité et variété architecturale, de par sa propreté sanitaire, de par une circulation automobile quasi-inexistante, de par son ambiance sage et néanmoins joyeuse...
    Il y a bien sûr sa magnifique mosquée, que nous contemplons au lever de soleil, de la terrasse, encore enfouis dans nos couchages, et dont nous ferons le tour lors de notre visite de la ville. Dommage que nous ne puissions entrer dans cet édifice majestueux au rayonnement spirituel et architectural très large, bien au-delà des frontières maliennes. Nous nous contenterons d’apprécier ses façades aux murs d’argile crépis de sable et plantés de bois, de traverser la grande place à ses pieds, quasi-déserte parce que nous ne sommes pas lundi, jour de marché.

    Il y a aussi ses quartiers aux ethnies diverses, songhaïs, peuls, dogons, bambaras, bozos, sarakolés, mossis… et à l’architecture dite soudanaise si typique de Djenné. Djenné a le profil d’une « vraie » ville, au sens européen du mot, avec des rues, des quartiers de maisons à étages et non une simple agglomération désordonnée de maisons sans toits… Ici, ce sont des maisons d’argiles aux hauts murs, aux influences marocaines ou Toucouleurs, aux encorbellements sur les portes pour forcer les cavaliers à mettre pied à terre, aux éléments décoratifs surprenants : on peut lire sur les façades le sexe de la maison, le nombre d’enfants dans la famille, … Quartier des potières, quartier des tisserands rimaïbés, quartier des forgerons, quartier des bijoutiers… Et partout des portes ouvertes sur des cours où en cette matinée les enfants récitent leurs versets coraniques avant de rejoindre l’école laïque…

    Il y a aussi ces berges du Bani où se rendent les femmes pour chercher l’eau, pour faire la lessive, la vaisselle, la toilette, pour cultiver et irriguer ces petites parcelles de verdure qui bordent la ville…

    On resterait bien un peu plus longtemps à arpenter cette ville au charme sensible, ou assis sous un nîm à regarder la vie s’écouler… à attendre le marché si réputé de couleurs, d’odeurs et de sons de demain… Mais il nous faut déjà repartir après ces quelques heures, petit butinage qui ne fait que mettre en appétit…
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    Message par Wapiti Jeu 20 Aoû - 20:58



     
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    Message par Skyrgamur Jeu 20 Aoû - 23:56

    Je suis toujours fascinée par cet édifice en terre crue.


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    Message par Wapiti Ven 21 Aoû - 20:19

    130 kilomètres plus au nord-est, après un bref arrêt dans un marché de village sur la route, nous arrivons pour l’heure du déjeuner à Mopti, notre dernière étape.
    Le repas est épique dans ce restaurant si réputé et fréquenté surplombant le port… longue attente affamée, grosse colère de notre guide, et finalement dégustation d’un tieboudien revigorant.
    S’ensuit une longue et chaude promenade digestive dans Mopti, ville commerçante au confluent du Bani et du Niger.

    Mopti m’apparaît comme une succession de marchés immenses à ciel ouvert, à peine entourés de quelques quartiers d’habitation, des berges du fleuve, et d’une bien belle mosquée, quoique plus petite que celle de Djenné dont elle est la réplique.
    Nous visiterons le plus grand chantier naval de la région, immense hangar où sont fabriquées les pirogues par les bateliers Somonos assis à même le sol, dans la poussière et la sciure, à proximité de minuscules forges pour fondre et frapper les clous à partir d’acier recyclé.
    Nous errerons sur le marché autour du port où l’on peut trouver de tout ou presque, à même le sol ou sur de précaires étals… sur le marché aux poissons qui me laissera le souvenir de la deuxième senteur de ce voyage, odeur puissante du poisson qui sèche en tas énormes sous le soleil, dans la moiteur pesante de l’après-midi… dans le marché des artisans où il est difficile de circuler tranquillement sans se faire alpaguer par les vendeurs… « pour le plaisir des yeux » encore… Un peu plus loin, au marché des femmes, bâtiment ouvert à tous vents où règne une ambiance tranquille en cet après-midi, au milieu des fruits et légumes étalés à même le sol, avec, à l’étage, le souk des artisans, véritables cavernes d’Ali Baba… « pour le plaisir des yeux » toujours…
    Nous arpenterons la rue des antiquaires, traverserons quelques quartiers assommés de chaleur, au milieu de leurs détritus, éviterons de justesse plusieurs accidents avec des véhicules se moquant éperdument de nos velléités de piétons, ferons nos derniers achats avant le départ qui se profile, rejoindrons finalement saufs notre hôtel « Y a pas de problème » où nous attend la piscine, des chambres avec moustiquaires, un bon repas, une soirée tranquille et nostalgique… Nous le savons, c’est la dernière ensemble, ici, au Mali ; demain soir nous serons de retour dans notre vie agitée et matérielle de France… inch’Allah !
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    Message par Wapiti Ven 21 Aoû - 20:21

     
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    Message par Wapiti Dim 23 Aoû - 9:09

    Le quinzième jour de ce circuit est un jour d’attente et de voyage. Attente de notre minibus à notre hôtel pour rejoindre le QG de l’agence à Sévaré où l’équipe nous fait patienter sous l’ombre fraîche des arbres. Ils s’occupent de l’enregistrement de nos bagages, nous offrent à boire, animent un dernier tour de danse de nos guides au rythme des djembés, qui attirent ici aussi tous les enfants du quartier… pour ne nous emmener qu’en dernière minute à l’aéroport, là où l’attente reste longue et fatigante, debout sous le soleil implacable de la mi-journée. Mais il nous faut quitter ce pays si accueillant et magnifique, il nous faut abandonner ce guide dogon si beau, sympathique et professionnel… Amono, nous ne pourrons oublier tout ce que tu as partagé avec nous, tout ce que tu nous as appris. Nous ne pourrons t’oublier, et c’est avec regret que nous te laissons. Au diable la bienséance malienne, ce sont des embrassades chaleureuses… avant de passer le cordon de police et de monter dans l’avion qui nous ramènera en soirée à Paris (ou Marseille pour les moins chanceux), dans la fraîcheur relative du printemps européen déjà bien en avance en ce début mars…

    Pendant le vol, le fabuleux voyage repasse en pensées, sous forme de flashs…
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    Pays Dogon et fleuve Niger : quinze jours au Mali  - Page 3 Empty Re: Pays Dogon et fleuve Niger : quinze jours au Mali

    Message par Wapiti Dim 23 Aoû - 9:11


    Falaise ocre du Pays Dogon avec ses villages caméléons… plaine sahélienne fauve et infinie… sable mais surtout poussière de latérite… heures langoureuses sur le Niger… bivouacs et campements au clair de lune… Tombouctou, Mopti, Djenné, Yendouma…

    Des milliers de chèvres bicolores, partout… des centaines et des centaines de zébus à la bosse dodelinante de graisse… quantité de volatiles en tout genre, coqs, poules, poulets bicyclette, dindons, oiseaux… des petits ânes au regard si tendre… quelques chiens… quelques hippopotames… une oreille et une trompe d’éléphant…

    Finalement relativement peu d’hommes… des centaines de femmes… des milliers d’enfants. Pour sûr, le Mali est un pays de jeunesse !

    Des saveurs qui reviennent en bouche. Car heureusement, j’ai gardé le goût. Et nous en avons goûté des saveurs nouvelles, différentes, surprenantes.
    Le bissap, un sirop d’hibiscus pour commencer, à notre arrivée à Sévaré. Plus tard, la tisane de la même fleur, ou celle de kinkiliba qui fit plus d’adeptes.
    Les fruits et légumes frais, vraiment goûteux. Tomates, aubergines… petites bananes tachetées très savoureuses, rien à voir avec toutes celles que j’avais mangées jusqu’à ce jour. Mangues délicieuses… Oranges maliennes, aussi petites que nos citrons, qui ne paient pas de mine, à l’écorce tachée, racornie… très difficiles à éplucher, mais quel régal !
    Nous aurons testé le pain de singe, fruit du baobab, chaire blanche sèche peu inspirante, à laisser fondre sur la langue, au goût acidulé de pure vitamine C. La noix de cola, très amère ; mais pourquoi les « vieux » Dogons en raffolent-ils ? Cela reste un mystère…
    Le dolo, bien sûr ! Bière de mil qui ne ressemble en rien à nos bières et est plus appréciée par ceux qui, justement n’aiment pas la bière d’habitude. Faiblement alcoolisée, mais qui peut finir par tourner la tête consommée en grande quantité.
    Un regret : ne pas avoir eu l’occasion de tester ne serait-ce qu’une fois le tô, plat de base de l’alimentation dogonne, à base de mil.


    Des découvertes, il y en a eu des centaines, de tous genres. Parfois surprenantes, certaines nous ont fait rire, d’autres nous ont plu tout simplement. Rares ont été les mauvaises surprises… ou les impressions désagréables.  
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    Pays Dogon et fleuve Niger : quinze jours au Mali  - Page 3 Empty Re: Pays Dogon et fleuve Niger : quinze jours au Mali

    Message par Wapiti Mer 26 Aoû - 22:39

    Les lignes qui vont suivre ont été écrites quelques semaines après mon retour.
    Lors de leur première publication, elles avaient fait débat...
    Elles ne sont de fait que le reflet de mes impressions et sentiments à cette époque là, il y a 9 ans déjà...





    3/ EPILOGUE


    Un mélange détonnant de ravissement et de malaise. Voilà le goût sucré-amer que le Mali me laisse en tête et dans le cœur.

    Le beau, j’en ai déjà beaucoup parlé. Ces paysages, ces ambiances, ces rencontres…

    Le malaise, c’est ce fond de honte qui m’a plusieurs fois assaillie sur place et qui me tenaille encore (et peut-être plus) depuis mon retour. Honte, culpabilité, indignité… à plusieurs titres.

    Tout en connaissant parfaitement tous les bienfaits économiques (et sanitaires) de notre présence touristique pour le Mali et ses habitants, pour les populations de ces villages si pauvres, je ne peux m’empêcher de me sentir honteuse d’être là avec et grâce à toute ma richesse d’occidentale.
    Le décalage de niveau de vie, de pouvoir d’achat est trop important.
    J’ai beau savoir que le prix de mon hébergement, l’essentiel de ma nourriture, les salaires de l’équipe qui nous accompagne, sont des ressources directes pour les familles locales… que les quelques dons effectués à l’école, au dispensaire, à certaines personnes, sont des aides non négligeables pour la région… qu’une partie du prix de mon séjour payé à l’agence française sert directement à financer des projets de développement (puits, coopérative, soins…)… J’ai beau savoir tout cela, je me sais habillée et équipée d’une richesse faramineuse ; mes vêtements techniques, mes baskets de trail, mon sac à dos plein me pèsent ; je sens les billets et la carte bancaire qui me brûlent la peau dans ma poche…
    Certes, quand je refuse un don demandé j’agis pour le bien de la personne, mais ce présent est si peu pour moi et peut avoir une si grande valeur pour celui qui le reçoit… Certes je ne dois pas donner sans échange pour ne pas favoriser l’assistanat, la mendicité, l’injustice, mais comment ne pas donner devant tant de dénuement, de sourires… Certes, je dois veiller à ne pas payer le prix fort pour ne pas engendrer d’inflation qui toucherait les locaux, mais le prix-‘arnaque’ est lui-même si bas, parfois dérisoire par rapport à la valeur du bien dans mon pays d’origine…
    Quel sentiment d’impuissance que d’être là avec nos deux sacs d’affaires que l’on ne peut décemment pas distribuer, et de voir ces gamins en guenilles, souvent pieds nus, parfois malades, quelques fois le ventre gonflé par la malnutrition…
    Quand je vois comme ces familles, nos hôtes des campements, notre équipe, se mettent en quatre pour nous offrir des conditions de confort intéressantes, des quantités d’eau suffisantes à nos douches, des fruits, de la nourriture en abondance… alors qu’autour tant vivent dans des conditions de dénuement extrême, avec une bolée de mil pour seul repas quotidien, que chaque seau d’eau que nous utilisons est une richesse puisée et portée par l’effort d’une femme ou d’un enfant…

    Une autre terrible sensation, de n’être absolument pas à ma place, de n’avoir pas le droit d’être là, d’être un voyeur. Qui suis-je pour venir regarder ces gens vivre, moi, avec toute ma richesse et ma culture occidentale sur le dos ? Terrible sensation d’être au zoo… visiteur d’un zoo humain… visiteur qui balance quelques sourires, quelques euros, quelques barres de céréales et fruits secs en passant… et qui prend des photos-souvenirs de ce « spectacle » naturel…
    Et pourtant ce n’est pas du tout dans cet état d’esprit que je voyage, que j’appréhende la découverte d’un pays ou la rencontre de l’autre !… au Mali comme ailleurs.
    Et j’ai à nouveau honte, mais cette fois d’avoir ces pensées…

    Ce doit être cela le choc de l’Afrique noire. On m’avait prévenue, je m’attendais à certains « décalages », mais peut-être pas à ce point.
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    Pays Dogon et fleuve Niger : quinze jours au Mali  - Page 3 Empty Re: Pays Dogon et fleuve Niger : quinze jours au Mali

    Message par Wapiti Mer 26 Aoû - 22:52

    Et pourtant, c’était beau, c’était intense, c’était merveilleux. Et pourtant, j’ai tellement envie d’y retourner, vite ! Plus longtemps.
    Là-bas dans ces villages dogons traversés, mais aussi là où je ne suis pas allée, sur le plateau, au sud de la falaise de Bandiagara, à l’ouest du Mali, dans de nombreux autres pays de cette Afrique occidentale (Sénégal, Guinée, Cameroun, Togo…)

    Ils sont noirs, je suis blanche.
    A échelle financière comparable, ils sont très pauvres, je suis déjà richissime.
    Et pourtant…
    Ils sont riches de leur joie de vivre ; je suis si démunie face aux bonheurs simples de la vie.
    Ils apprécient l’instant présent ; j’ai beaucoup plus de mal à le faire, me posant parfois des questions existentielles qui me pourrissent la vie ! (si vous avez lu les paragraphes précédents, vous ne pouvez qu’en convenir ! siffleur )
    Ils vivent joyeusement dans un dénuement extrême et des conditions de vie rudes ; comme la très grande majorité des européens je sais me plaindre de mes conditions matérielles de vie, si confortables comparées aux leurs !

    Ils sont noirs, je suis blanche.
    Ils sont noirs, ils sont beaux, ils ne me font pas peur.
    sourire
    (un petit lien avec un texte controversé de Pondy).  


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    Message par geob Jeu 27 Aoû - 16:54

    Bien entendu, chacun pense ce qu'il veut, néanmoins je suis surpris par tes lamentations sur toi-même, disons plutôt par tes émotions, ton ressenti sur cette pauvreté qui te saute à la figure et qui semble t'étonner. Tes émotions ne parlent que toi mais absolument pas des Africains. Tes annotations sont très justes lorsque tu te sens "voyeur", mais c'est inévitable à partir du moment où tu voyages en groupe et que tu n'es que de passage. Tout de même, on vit dans une société où aucune actualité nous est épargnée, où tout se sait, où tout est transparent, tu n'aurais pas dû être surprise par cette pauvreté au Mali dont les principaux responsables sont ces élites africaines voraces qui garnissent leurs comptes en banque plutôt que fournir le nécessaires à leurs peuples. Heureusement, tu te rattrapes un peu en parlant de ta honte d'avoir eu des pensées négatives sur toi-même, mais tout cela n'est pas très clair, tu sembles danser sur un fil tendu au dessus de ta vie.

    En te lisant, il y a un livre qui m'est instantanément revenu à la mémoire :

    http://www.lemonde.fr/idees/article/2008/08/14/le-sanglot-de-l-homme-blanc-par-philippe-bernard_1083679_3232.h
    (une critique que je ferais sur Pascal Bruckner, c'est d'avoir cautionné la guerre en Irak)

    Après tout, si tu as ressenti de la culpabilité, c'est sans doute qu'il y a en toi un bon fond, comme une vocation réprimée. Tu devrais retourner au Mali, seule ou juste avec quelqu'un, prend le temps de rester dans un endroit, planque ton appareil photo, et parle, parle, parle avec les gens et surtout ne rien attendre d'eux, ne rien espérer. Bien sûr que voyager en Afrique est déstabilisant, nous avons tellement l'habitude de vivre dans une société protégée, où tout nous est offert sans que l'on fasse le moindre effort. On a soif? Il suffit d'ouvrir le robinet et nous avons de l'eau potable tout de suite dans notre verre. Un truc bête mais si confortable : chez nous, lorsqu'on veut acheter quelque chose, nous savons quel est le prix puisqu'il est affiché, au Sénégal, où j'avais voyagé avec un ami, je me souviens du premier achat que je voulais faire dans un marché, il n'y avait aucun prix affiché, alors j'ai demandé à un gars qui se promenait s'il pouvait m'indiquer le prix de l'objet, et tu sais ce qu'il m'a répondu? Il faut parler !

    Si tu retournes au Mali, tu le verras d'une manière différente, au delà des oripeaux. Et peut être que tu liras dans le sourire qu'ils t'offriront l'amusement de te voir gênée par ton propre niveau de vie.

    En tout cas, ton carnet était agréable à lire !

    Qui va doucement, va longtemps la star !

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